« Aujourd'hui mon père s'en va, je ne sais pas quand il rentrera, ni s'il le fera. Parfois, on attend, on sursaute au moindre coup de fil ou coup de sonnette. Parce que là-bas, ce n'est pas le pays imaginaire. On y voit des horreurs, on y meurt, et je le sais, mon père n'est jamais le même quand il rentre. »

« Cela fait un an que mon mari est en mission. J'ai presque l'impression d'être mère célibataire. Devoir expliquer à ses enfants que papa reviendra après sa mission devient dur. Ils pensent qu'on les abandonnes. »

Tant de familles, toutes différentes vivent « on post ». Autrement dit, sur une base militaire. Ici comme ailleurs, on ne suit que les règles de l'armée. Tout compte. On vit en communauté et chaque jour suffit sa peine. Certains n'ont connu que ça, d'autres viennent d'arriver, certains par la famille, d'autre par le mariage. Chacun est différent. La vie ici est tout de même assez spéciale. Ici, on se serre les coudes. Que ce soit les veuves qui sont atterrées, les mères éplorées, les familles dont le père, le frère ou le mari est déployé, tout le monde a son propre schéma et tous savent où trouver du soutien. Les hommes rentrent et retrouvent leurs familles, tentent d'oublier les horreurs vues là-bas, prétendent savoir vivre normalement, là où d'autres deviennent fous. Chacun a sa façon de gérer leur déploiement, chacun a sa façon de gérer le retour. L'attente, la peur, les bombes, le manque. Ici c'est le quotidien. L'image qu'on véhicule n'est pas la même pour tous, que vous soyez un sergent, un colonel ou un lieutenant. Mais qu'importe le grade que vous avez, les soucis et les joies qu'engendrent cette vie est la même pour tous.